1996,
Descartes a pensé et affirmé avoir ‘achevé la géométrie’, ce qui n’est évidemment pas vrai, comme l’ont immédiatement prouvé les développements ultérieurs de cette science. La revendication cartésienne doit cependant àªtre prise au sérieux car elle n’est pas sans fondement. L’algébrisation à laquelle Descartes donne un élan décisif est un mouvement qui fera bientà´t éclater les frontières du domaine traditionnel des mathématiques : caractère de nombres aussi bien que de lignes, expression possible d’algorithmes nouveaux, les nouvelles écritures se libèreront de leur racines-entraves géométriques. Exprimables ‘algébriquement’, de nouvelles équations, de nouveaux lieux repousseront les limites de la science mathématique.
L’enjeu n’est pas de transformer la nature de la science mathématique mais de transformer son étude. Alors surgit une illusion, une chimère : le passage à l’algèbre apparaà®t comme une solution définitive, le terme de la confusion et de l’aveuglement et au bout du compte il annonce, voire réalise l’achèvement des mathématiques. Cette illusion est compréhensible : en ne modifiant pas la science mathématique elle-màªme, dans sa nature, dans ce que l’exercice raisonnable et rationnel de l’entendement l’autorise à examiner et à comprendre, bref en n’élargissant pas le domaine de la connaissance légitime et dans le màªme temps en démultipliant les moyens d’investigation de l’esprit humain aventuré en géométrie, en augmentant considérablement sa capacité de synthèse, de déduction, on pouvait fort logiquement estimer àªtre en mesure d’explorer tout le connaissable des mathématiques.
Paris, PUF, collection Philosophie, 1996
Professeur d’histoire et philosophie des sciences.
Philosophie et sciences à l’à¢ge classique.
à‰pistémologie des sciences de la nature.
Mathématiques à l’à¢ge classique.
Courrier électronique : Vincent Jullien
Vincent JULLIEN & André CHARRAK
De 1618 à 1646, une étude de la philosophie naturelle cartésienne
Presses Universitaires de Rennes, 2002
Essai sur la place des sciences dans notre culture
Dans « Le vide et l’indicible au XVIIe siècle » (C. Biet et V. Jullien éditeurs), numéro spécial de la revue XVIIe siècle, juin 2000.
Historia Scienciarum, mars 1999
Science et techniques et perspective, nouvelle série, n°2, 1998
Ordre et contestation au temps des classiques, Biblio 17, Papers on French Seventeenth Century Litterature, n°73, Paris-Seattle-Tà¼bingen, 1992